Synopsis : Au sommet de sa carrière d’acteur, Serge Tanneur a quitté une fois pour toutes le monde du spectacle. Trop de colère, trop de lassitude. La fatigue d’un métier où tout le monde trahit tout le monde. Désormais, Serge vit en ermite dans une maison délabrée sur l’Île de Ré… Six ans plus tard, Gauthier Valence, un acteur de télévision adulé des foules, abonné aux rôles de héros au grand cœur, débarque sur l’île. Il vient retrouver Serge pour lui proposer de jouer «Le Misanthrope» de Molière. Serge n’est-il pas devenu une pure incarnation du personnage d’Alceste ? Serge refuse tout net et confirme qu’il ne reviendra jamais sur scène. Pourtant, quelque chose en lui ne demande qu’à céder. Il propose à Gauthier de répéter la grande scène 1 de l’Acte 1, entre Philinte et Alceste. Au bout de cinq jours de répétition, il saura s’il a envie de le faire ou non. Les répétitions commencent : les deux acteurs se mesurent et se défient tour à tour, partagés entre le plaisir de jouer ensemble et l’envie brutale d’en découdre. La bienveillance de Gauthier est souvent mise à l’épreuve par le ressentiment de Serge. Autour d’eux, il y a le microcosme de l’Île de Ré, figée dans la morte saison : un agent immobilier, la patronne de l’hôtel local, une italienne divorcée venue vendre une maison. Et l’on peut se prendre à croire que Serge va réellement remonter sur les planches… (source : allocine.fr)
Ma chronique (c’est vrai, c’est bien plus joli que critique, merci à L’Oncle Paul pour la nuance !) sera dithyrambique, mais pas en Alexandrins… N’est pas Molière qui veut !
Alceste à bicyclette, c’est le Misanthrope revisité. Serge vit en Misanthrope sur son île… Seul, désabusé, humilié par un milieu du cinéma et du théâtre auquel il a pourtant tout donné, et plus encore… Quand Gauthier, acteur à succès pour TF1 débarque sur l’île pour lui proposer un rôle théâtral qui lui permettrait de faire glorieusement son comeback, Serge devrait se réjouir , mais Serge n’est pas d’une nature à se réjouir… Alceste à bicyclette est vraiment l’histoire d’un Alceste moderne… Luchini et Wilson portent le film sur leurs épaules… Ils sont seuls la plupart du temps à se déclamer du Molière, un Molière qui permet de dévoiler les failles et les non-dits, les rancunes et les rancœurs de leur vie…
Luchini et Wilson sont tous les deux exceptionnels, dire Molière, c’est un défi. Réussir à le dire en offrant toutes les émotions, toutes les nuances du texte, c’est une merveille. Les voir répéter inlassablement le Misanthrope, donner tout son sens au texte, ce fut un pur plaisir. Il faut des acteurs exceptionnels pour faire vivre un texte comme celui-ci, au milieu d’une intrigue moderne qui le remet au goût du jour… Car, notre époque égocentrique pourrait bien voir naître de nouveaux Misanthropes.
Je retiendrai des scènes exceptionnelles, des acteurs magnifiques. Je savais Lucchini bon acteur (j’ai beaucoup aimé Beaumarchais L’insolent, il y a fort, longtemps), je le sais maintenant grand acteur ! Et bien sûr, Je vous ai déjà dit toute l’admiration que j’ai pour Lambert Wilson, elle est plus que confirmée par une certaine tirade dite avec tant de cœur, de rancune, de violence et de talent. Vraiment messieurs, chapeau bas !
Philippe Le Guay et Fabrice Luchini dénoncent à tour de bras dans ce film : La médiocrité qui fait loi, l’absence de loyauté, la mégalomanie… Je suis certaine que situer l’intrigue sur l’île de Ré n’est pas non plus innocent… En effet, cette pauvre île est devenue un autre Saint Tropez (du point de vue pécuniaire), simplement parce qu’un politicien s’y est installé il y a quelques années après une déculottée électorale… A quoi tient l’inflation ? Ce film règle aussi des comptes avec le milieu du cinéma (du théâtre, de la télévision), mais il solde surtout les comptes avec la nature humaine. Depuis Molière et son Misanthrope, l’homme n’a pas changé, et au final, Serge le Misanthrope n’est pas meilleur que Gauthier l’acteur arrivé…
Film de Philippe Le Guay, coécrit avec Fabrice Luchini. Avec Fabrice Luchini (Serge Tanneur) et Lambert Wilson (Gauthier Valence)… Je m’excuse auprès de l’excellent casting du film, mais pour ce premier visionnage, je n’ai vu qu’eux…