le crime du chevalier dupin – Episode 5

Le poison

Le froid était venu soudain. L’automne new yorkais si célèbre pour sa douceur n’avait été qu’un rêve d’un ou deux jours. L’été mourut pour laisser place à un hiver rude, désolant. Euréka était en train de naître, et cela grâce à Sarah. Poe revivait grâce à elle, et grâce à son autre projet. Cependant, cela n’avançait pas avec célérité. Il devait réfléchir et réfléchir encore pour être sûr de faire les bons choix. Il ne pouvait pas prendre de notes, de peur d’être découvert. Il allait brûler les pages qu’il avait brossées quelques semaines plus tôt. Le crime n’était pas assez grandiose, ni assez sordide. Il fallait que ce soit parfait, que le discrédit fut total.

L’horloge sonna sept heures. Il était temps de s’arrêter d’écrire pour penser à la soirée qui l’attendait. Sarah l’avait invité à diner, et il se devait d’être ponctuel et bien mis. Mrs Whitman ne badinait pas avec l’étiquette. Il se leva donc pour se préparer, mais fut casser en deux par une quinte de toux. Depuis quelques jours, sa santé était mise à rude épreuve par le froid. Il chercha des yeux son cordial et le découvrit sur la table basse, prêt de la porte. La bouteille ne cessait de se déplacer. Maria le poursuivait avec ce remède. La toux le reprit et il adressa une pensée à Maria qui le protégeait avec tant d’abnégation. Il prit la bouteille, une cuillère, et se ravisa. Quelques gouttes ne seraient pas bien utiles. Il se versa un demi-verre de la potion qu’il agrémenta de deux sucres pour en masquer le goût. Il l’avala d’un trait, et tomba inconscient.

– Comment a-t-il pu s’en procurer ? interrogeai sèchement la voix.

Un murmure et des sanglots lui répondirent. Dans un brouillard auditif et visuel, Edgar Poe reprit douloureusement conscience. Son corps et son esprit étaient en souffrance.

Où était-il ? Qu’était-il arrivé ?

– Il est conscient, reprit la voix. Monsieur Poe, m’entendez-vous ?

Il voulut répondre, mais sa voix lui sembla un étrange croassement. Elle lui fit l’effet d’une plainte, rauque, faible.

– Que dit-il ?

C’était Maria, il reconnaissait son timbre doux.

– Du pain ?… Je pense qu’il délire. Laissons-lui encore quelques heures pour se remettre. Il est hors de danger.

Le docteur – cette voix froide, sans émotion, professionnelle, ne pouvait-être que celle d’un docteur – le docteur et Maria s’écartèrent un peu. Il entendit un fauteuil grincer à sa droite. Maria avait dû s’asseoir près de l’âtre. Sans la voir, il l’imaginait lissant sa jupe noire, les yeux fixés sur le praticien, debout devant elle, peut-être appuyé au manteau de la cheminée.

– Ce remède, commença Maria sans oser poursuivre.

– La fiole sentait fortement le laudanum, mademoiselle, interrompit le docteur. Il n’y a pas eu d’erreur dans la prescription, pourtant ; le pharmacien le jure, et c’est un homme capable dont je ne remets pas la parole en doute…

Du laudanum… Poe se souvint du goût étrange de la mixture. Son remède était sur la table basse… Il ne l’y avait pas laissé, Maria non plus.

Dupin.

A Suivre …

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Le Crime du chevalier Dupin ~ Episode 1

Le cabinet de lecture

       Il fut un temps où on appelait ces lieux des cabinets de lecture. Bibliothèques, cafés littéraires, librairies, aujourd’hui, les livres sont partout, même virtuellement. J’avais pourtant découvert cet endroit suranné comme par miracle, un après-midi où j’errais dans Paris au hasard. J’adore faire cela, sortir du métro dans un quartier que je ne connais pas et avancer sans but, tourner dans une rue parce que son nom est amusant ou mystérieux, ou simplement parce que les voitures interdisent de traverser la chaussée dans l’instant. C’est ainsi que j’ai découvert des magasins exotiques ou baroques, des bouquinistes insolites, des monuments fantastiques et méconnus, des gens charmants et excentriques. C’est ainsi que j’entrai dans ce lieu antique, caché dans une arrière-cour envahie de glycines. La peinture de l’enseigne était écaillée, mais la propreté maniaque. L’endroit sentait la cire fraîche et le parfum doux de la Reine des Prés. J’eus l’impression de plonger un siècle ou deux dans le passé, le Paris de la Belle-Epoque ou sous la Restauration, un Paris dont je rêvais depuis l’enfance, à travers mes lectures. A l’intérieur, les livres s’alignaient sur des étagères sombres et massives, impressionnantes mais accueillantes. Les journaux reposaient négligemment sur leur râtelier, comme dans les grands restaurants, comme hier. L’odeur du papier se mêlait harmonieusement à celle du bois et de la cire. Je fis un pas, puis un deuxième dans ce lieu onirique, tentée de me pincer pour vérifier que je ne rêvais pas. Une toux discrète mit fin à ma bienheureuse solitude dans le fantasme d’un temps disparu. Un vieil homme était assis à l’opposé de la porte. Il replia son journal – La une donnait bien la date et les événements du jour – et vint m’accueillir

– Cherchez-vous un ouvrage en particulier, mademoiselle ?

Cette question était un test. Je le sentai. Il ne fallait pas répondre en hâte, il fallait offrir une réponse satisfaisante, une réponse qui prouverait que j’avais le droit de m’asseoir à l’une de ces belles tables de merisier à pieds de griffons et au plateau d’écailles de tortues.

Quel livre ?

– L’Atrée… l’Atrée de Crébillon, demandai-je dans une impulsion alors que ce livre m’était presque inconnu.

Le vieux visage de parchemin s’illumina d’un sourire joyeux. J’avais passé l’épreuve avec succès. Mon hôte se précipita avec une noble lenteur vers une bibliothèque qui ployait sous de volumineux in-quarto, des livres aussi anciens que vénérables, patinés par le temps. Il revint avec le volume entre ses mains tendues, Saint Graal parmi tant de reliques précieuses et inestimables.

Il tira une portière, s’effaça pour me laisser entrer dans une seconde salle, plus petite, plus baroque également. Les livres y étaient serrés dans des bibliothèques grillagés comme par des moucharabiés, leurs reliures précieuses luisant discrètement dans la pénombre ambiante. Mon Cicérone m’installa à une délicate table marquetée, chef d’oeuvre qui représentait une scène de chasse avec chiens, chevaux, cors et une malheureuse biche aux aboies, perdue, acculée en haut d’un éperon rocheux. Je restai un moment à admirer ce travail exceptionnel, songeant à l’artisan qui l’avait réalisé de nombreuses décennies plus tôt. Le vieux monsieur revint m’offrir un grand verre de thé glacé qu’il déposa sur un sous-verre en cuir parfaitement exquis. Je pris alors la mesure du personnage et de son anachronisme. Il ressemblait à un employé de bureau du début du siècle dernier avec sa chemise blanche immaculée et amidonnée, son faux-col, ses manchettes cartonnées et son gilet noir un peu élimé mais impeccable. Il ne portait pas des lunettes, comme je l’avais cru, mais des binocles qui pinçaient son imposant nez en bec d’aigle. Son sourire avait la sagesse d’un millénaire, me sembla-t-il. Quand je le remerciai, il inclina la tête pour me saluer et disparut dans la grande pièce. Les heures passèrent.

L’Atrée, ou plutôt Atrée et Thyeste… Ceux qui n’ont pas lu cette pièce de Crébillon perdent beaucoup. C’est une merveille de cruauté, de perfidie. La lutte entre deux frères ennemis qui dévoile toute la monstruosité de la race humaine.

Une toux discrète. Je relevai des yeux curieux vers l’intrus. Ce n’était pas le vieux monsieur, mais un jeune homme. Il était tout aussi hors du temps que mon hôte avec sa redingote grise, sa chemise à jabot et sa lavallière d’un vert éclatant maintenue par une épingle qui se terminait par un cabochon d’émeraude aussi gros qu’un oeuf n œuf de pigeon. Nos regards se croisèrent. Des verres céladon masquaient la couleur de ses yeux. Je n’avais jamais vu de telles lunettes. Elles étaient là pour cacher quelque chose, mais l’éclat du regard était tel que j’eus l’impression de voir l’âme de cet homme. Et quelle âme !… Il était grand, extrêmement grand, et maigre, à l’extrême. Son corps donnait une impression de faiblesse et pourtant ses yeux montraient une force incommensurable. L’élégance de ses mouvements faisait écho à la beauté de son visage. Ses traits étaient accusés mais fins, délicats comme ceux d’une femme, annonçant une volonté qui ne s’en laissait pas compter. Ses cheveux blonds, épais, cascadaient en boucles légères jusqu’à ses épaules. Une mèche rebelle tombait sur son nez, devant ses yeux, masquant en partie un front haut d’intellectuel. Finalement, il sourit. Je me rendis compte que j’avais souri la première. Il leva une main délicate, des doigts à la finesse terrible et retira ses lunettes à l’absente monture d’acier. Ses yeux avaient la couleur du bronze le plus brillant, des yeux de chat.

– Je m’excuse, commença-t-il d’une voix profonde, faite pour parler en public, pour impressionner un auditoire, mais j’ai laissé hier une lettre dans le livre que vous êtes en train de consulter. Je suis absolument confus de vous déranger ainsi…

Sans le laisser terminer, je fis apparaître une lettre que je lui tendis.

 

A Suivre …

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Le Feuilleton de L’été commence demain !

Warning_signUPDATE : Vous êtes prêts ?

Car demain commence le Feuilleton de l’été de mon blog !

article du 9 mai :

couv lupin 1erEdition, ton univers impitooooyaaabbble…

Pour avoir travaillé des 2 côtés de la barrière, je peux vous dire que Dallas et le milieu de l’Edition ont beaucoup en commun… 

Toujours à la recherche d’un nouvel éditeur pour mes oeuvres, toujours en train d’écrire, je me dis que j’ai malgré tout envie de partager avec vous certains de mes textes, ici, maintenant, et que ce blog est donc le meilleur moyen d’offrir ma plume au monde (pompeux ? oui, légèrement).

Que diriez-vous d’un petit feuilleton sur le blog pendant les mois d’été ? livraison tous les vendredis ?Dans la lignée de mon pastiche d’Arsène Lupin ?

Donc, selon la formule consacrée :

à suivre …

 

 

« Les Livres, Mes Livres et Moi » a un an ! concours !

Un an déjà… Le Temps file à une vitesse…

Je ne suis toujours pas satisfaite de l’appellation, mais très heureuse de m’être lancée dans l’aventure. A cause de mes livres bien sûr, mais aussi parce que cela me permet d’échanger sur ce que j’aime avec des personnes qui aiment les mêmes choses, ou sont curieuses (ou n’aiment pas, mais le disent de manière constructive!)

Un an ! je vais éviter le coup de blues traditionnel des anniversaires et vous proposez un petit concours pour fêter cela dignement !

j’ai donc « bûché » sur un petit jeu d’esprit en rapport avec mon cher gentleman-cambrioleur, histoire d’occuper vos soirées pour les 3 semaines à venir (le concours démarre aujourd’hui, 15 février 2014, date anniversaire de mon blog, et se terminera le 9 mars à minuit, avec annonce des résultats le 10 mars. C’est toujours la même main innocente qui s’occupera du tirage au sort, j’ai nommé ma maman – qui prend très au sérieux cette responsabilité ).

Voici donc mon jeu d’esprit, un mots-croisés lupinien (fait maison, comme vous pouvez le constater!) :

Le but est bien sûr de me renvoyer la grille remplie avant la date butoir (si vous avez des soucis avec le formulaire d’envoi au bas de la page, la liste de vos réponses, c’est très bien aussi…)

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Pour l’occasion, je récompenserai 3 personnes :

1er prix : 

Arsène Lupin et Cie (dédicacé)

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2ème prix :

Bec-en-Fer chez Dracula (parce que j’aime les vampires ! – ceci est une bande-dessinée, j’en parle sur le blog ICI)

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3ème prix :

un lot de marques-pages sympathiques, français et britanniques.

Bonne chance à tous ! 

Règlement du concours :

1. les participants doivent « aimer » la page facebook et laisser un petit commentaire sur le blog quant à leur participation (mais pas les réponses! ;) ). Concours ouvert à la France et pays limitrophes (et oui, les frais de poste étant ce qu’ils sont, je suis obligée de restreindre…)

2. Vous avez jusqu’au dimanche 9 mars minuit pour participer.

3. Il y aura tirage au sort par main innocente (ma maman, si vous voulez savoir) entre les bonnes réponses .

4. lots: 1 exemplaire offert par l’auteur de l’ouvrage Arsène Lupin et Cie, dédicacé, un exemplaire de la BD Bec-en-Fer Chez Dracula de Jean-Louis Pesch, et un lot de marques-pages.

Amours et Enfants d’Arsène Lupin

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Reprise d’une liste que j’avais préparé pour un site décédé depuis (RIP)… C’est un peu encyclopédique, mais j’espère que ces informations vous intéresseront!

Je développerai certainement dans le futur des articles sur l’un ou l’autre de ces personnages. N’hésitez pas à faire des suggestions 😀 .

[(r) pour roman et (n) pour nouvelle et (t) pour théâtre]

Arsène Lupin n’est pas seul, même s’il est parfois solitaire!

  • Arsène Lupin et les femmes

Attention, elles sont légions, mais certaines n’ont été que des flirts, parfois même platonique! les noms les plus importants sont indiqués en couleur.

Clarisse d’Etigues qu’il épouse dans La Comtesse de Cagliostro.(r) et avec qui il aura un fils, Jean.

Joséphine Balsamo, dite comtesse de Cagliostro.

Arsène en tombe amoureux …

« Fille de Cagliostro, je vous connais. Bas les masques ! Napoléon Ier vous tutoyait… Vous avez trahi Napoléon III, servi Bismarck, suicidé le brave général Boulanger ! Vous prenez des bains dans la fontaine de Jouvence. vous avez cent ans… et je vous aime. »
Déclaration de Lupin à Joséphine (La comtesse de Cagliostro, p.45)

Viennent ensuite des amours plus ou moins de passage : Nelly underdown (n), Yvonne d’Origny (n), Gabrielle (n), Sonia Krichnoff (t) (n), Angélique de Sarzeau-Vendôme (n)  qu’il épouse, Clarisse Mergy (r), Clotilde Destange (r)…

Raymonde de Saint-Véran qu’il épouse dans L’Aiguille creuse (r).

Aurélie d’Asteux (r), Hortense Daniel (n, tout un recueil).

Dolorès Kesselbach, personnage centrale dans 813 (r).

Florence Levasseur qu’il épouse sous l’identité de Don Luis Perenna dans Les Dents du tigre (r).

Olga Vaubant, mesdemoiselles Haveline et Legoffier (n) : Il séduit les trois le temps de la même nouvelle… Coquin!
Régine Aubry (r), Arlette Mazolle (r), Catherine Montessieux (r), Bertrande Guercin (r), Clara la Blonde (r), Antonine Gautier (r), Faustine Cortina (r), Patricia Jonston (r),  Marie-Thérèse Angelmann (r).

et une ou deux têtes couronnées…  Sa majesté la reine Olga de Borostyrie (r), La Princesse Alexandra Basileïf (r).

Il n’y a pas de raison pour qu’Arsène devienne sage sous la plume des autres, ainsi, chez Boileau-Narcejac, le temps de cinq nouvelles aventures, il séduit :

Incarnacion de capedé (n)  qu’il épouse, Lucille Ferranges, La comtesse Cécile de Mareuse, Simone de Mareuse, Madelaine Férelle, Béatrice Mendaille, Hélène Vaucelle.

Les enfants d’Arsène Lupin 

Du moins, voici les trois descendants du gentleman que l’on connait, même si certains doutes planent…

Jeanfils de clarisse d’Etigues, enlevé bébé par la Cagliostro, pourrait-être Félicien Charles (la Cagliostro se venge)

Geneviève, dans 813 : mère non identifiée 

L’héritier du trône de Borostyrie