IT (2017) d’Andy Muschietti

it1Grande fan d’horreur devant l’eternel (je précise, l’horreur intelligente qui se base sur un bon scénario, du suspense… et pas sur des litres d’hémoglobine versés pour le plaisir malsain de l’observateur… Massacre à la tronçonneuse et Hostel – surtout Hostel – passez votre chemin), grande fan d’horreur donc, je ne boude pas mon Stephen King.

Depuis 2 ou 3 décennies, les adaptations de celui qui a obtenu le titre de « maitre de l’horreur » se suivent, ne se ressemblent pas, et on plus ou moins de succès… Je place là le bon vieux « adaptation-trahison »… et citerez  une catastrophe comme Relic (pas de Stephen King je sais, mais catastrophe quand même !)…Salem lot (avec Hutch, de Starsky et Hutch) se regarde, j’avoue m’être endormi devant les Langoliers… par contre Misery … Cependant, « ça » a une place particulière dans mon coeur… facon de parler…

C’est peut-être parce que ce futuin de mes films découvert gamines (enfin, ado), ou peut-être à cause de Tim Curry… ou simplement parce que lorsqu’on a 12 ou 13 ans, et qu’on est ce que l’on appelait pas encore alors une geek, il est facile de s’identifier au 7 veinards…

Alors, la nouvelle adaptation, me direz-vous ?

Et bien, cela se regarde… le clown fait peur… à part cela, je vais m’en retourner vers mon téléfilm des années 90 sans regrets… Certes, les critiques et le public semblent tous crier au chef-d’oeuvre, et je dirais que sur le plan horreur, cela se tient, mais j’en reviens à la trahison…

Ca est un livre complexe, et bon nombre de détails ne se trouvent pas dans l’adaptation TV, cependant, celle-ci a le mérite d’être fidèle à la psychologie des personnages, à leur histoire personnelle… Ici, le passé de certains est noirci – dieu sait pourquoi – la manière dont les septs veinards tentent de tuer le  clown est changée… alors qu’elle était symbolique… Certains personnages sont transformés en clichés ambulants…

Je ne veux pas spoilier ceux qui souhaitent voir le film (et se faire leur propre opinion), mais il faut admettre que l’essence de l’histoire est trahie… Pour avoir vu et revu le téléfilm des dizaines de fois, j’avoue qu’ici, j’ai eu du mal à reconnaitre les gamins… qui jouent bien, ce n’est pas le problème, mais j’ai confondu pendant la première moitié du film Stan et Richie, l’un timoré et l’autre déluré… C’est dire. les aspirations de Bill a devenir écrivain ont également disparu… et cela c’est bien sur impardonnable de mon point de vue 🙂

Bref, à choisir, je préfère m’en retourner à l’adaptation TV, qui certes, n’avait pas montré autant de sang et de bras  arraché (était-ce bien necessaire ?), mais avait le suspense pour elle. Ne pas montrer peut faire aussi peur, voire effrayer plus que de montrer…

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Lecrime du chevalier Dupin – Episode 12

La mort du Chevalier (2)

« Sept jours pour mourir.

« Je sortis de mon tombeau sept jours après ma mort.

« Je considérai l’endroit où on m’avait déposé. C’était le même exil incompréhensible qui avait commencé pendant mon agonie. Il fallait un fautif… Mon cœur demandait une explication, une justification. Sans réfléchir un instant à ce que j’étais devenu, je marchai vers la maison. Je voulais paraître devant eux, terrible Némésis. Mais par la fenêtre, je vis leur déchéance. Je n’étais pas le bouc émissaire du malheur, j’étais son héraut. J’avais ramené Jeanne, j’avais succombé après elle. Mieux valait nous oublier. Et pour cela, il fallait partir ; laissez les morts, laissez-les entre eux, ils ne sont plus de ce monde.

« Abandonné.

« Alors, je me mis en quête de ma triste amante. Je ne fus pas plus heureux. Et les années passèrent… Ils revinrent. Mes parents avec des cheveux blancs, mon frère, sa femme et ma sœur vieillis, fatigués. Aucun enfant n’était venu combler le vide. C’était la fin de la brillante lignée des Dupin. Ils moururent, rejoignirent Jeanne. Ils se serrèrent frileusement les uns contre les autres dans la mort, m’abandonnant encore. Je ne pus l’accepter alors et je ne l’accepte toujours pas.

« J’avais veillé sur cette maison, inutile sentinelle, je voulais maintenant voir le monde. J’en avais le droit, et j’avais l’éternité… J’ai vécu les aventures que je vous ai conté, Edgar, et bien d’autres encore qui nous aurions pu rendre immortelles…

C’était une conclusion abrupte et inattendue. Mille interrogations se bousculaient dans l’esprit de l’écrivain. Il ne pouvait en poser aucune.

– Vous avez compris, n’est-ce pas ? demanda le chevalier alors que le silence se prolongeait.

Poe hocha lentement la tête.

– Vous n’êtes pas, murmura-t-il, vous n’avez jamais été mon œuvre.

Cette révélation perdait l’écrivain. En même temps, il comprit que les réponses n’avaient plus d’importance. Il était libre, il n’était en rien lié à Dupin. Il pouvait continuer son chemin vers la gloire, vers une gloire qui lui appartiendrait toute entière. Il était tellement soulagé qu’il était pris de faiblesse. Il posa la main sur la tombe du chevalier pour se soutenir, sans y prendre garde.

– Je suis le chemin de vos pensées, Edgar, reprit Dupin dans un souffle, si bas que Poe douta d’avoir entendu. Vous m’avez fait du mal. Par je ne sais quelle magie, mon destin s’est mis à vous appartenir quand vous rédigiez mes souvenirs, puis quand vous avez décidé d’écrire autre chose.

Le chevalier s’était redressé, sa nonchalance de conteur avait disparu derrière la flamboyance de son regard accusateur.

– Par votre faute, j’ai presque tué cette fille ! Je ne suis pas un pantin.

Poe recula. Il trébucha contre le cénotaphe et tomba lourdement. La pierre lui blessa cruellement le côté. La seconde suivante, il était debout ; pas par sa volonté, mais entre les mains du chevalier. Ce n’était plus Dupin, c’était un fauve aux yeux d’enfer.

– Comment savoir que vous ne jouerez plus avec mon destin ? interrogea-t-il, son souffle sur le visage de l’écrivain. Vous êtes trop fier, trop ombrageux. Vous me haïssez et ce sentiment sera plus fort que tout.

– Je vous jure… balbutia le poète.

Il ne termina pas. Il ne savait que promettre.

– Par un phénomène que je ne m’explique pas, reprit Dupin avec douceur, vous avez pris le pouvoir sur moi. Peut-être parce que vous êtes le conteur et que je me suis offert passivement à votre plume… Cela ne peut durer. Je ne veux pas périr. Je ne veux pas devenir un monstre non plus.

De la tristesse perçait dans la voix de Dupin. Poe comprit ce qui aller se passer.

– Un seul de nous deux sortira de ce jardin, prophétisa-t-il dans un souffle.

Le chevalier eut un rire sans joie.

– Non, nous en sortirons tout les deux… Pour la postérité, il le faut, cher Edgar. Vous avez dit vous-même que l’esthétique primait sur tout quand il fallait chercher l’effet… J’ai donc décidé d’écrire moi-même la conclusion de notre collaboration.

A Suivre …

Copyright/tous droits réservés Dorothée Henry

PAGE DU FEUILLETON

 

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Le Survivant de James Herbert

81e0DrwevaL._SL1500_présentation éditeur : Un Boeing 747 s’écrase près d’Eton. C’est l’une des plus effroyables catastrophes de l’histoire de l’aviation : 332 morts. Un seul survivant : Keller, le copilote, n’a aucun souvenir de l’accident. Tandis que tout le monde essaie d’oublier l’horreur du drame, lui cherche à comprendre pourquoi il y a échappé. Bientôt, il est hanté par des voix, celles des passagers morts dans le crash. Et cette hantise gagne peu à peu l’ensemble de la ville et des habitants d’Eton. Le jour de vérité approche, une vérité insupportable à laquelle Keller refuse de croire…

Voici un roman différent des précédents. On est loin de la hantise classique puisque le point de départ du roman, c’est Keller, seul survivant, impossible survivant d’un crash meurtrier au dessus de l’Angleterre. Keller ne se souvient de rien, ressent une grande culpabilité, a peur de ce dont il pourrait se souvenir… Hantise il y a malgré tout, hantise de l’âme d’abord, et mauvais esprits, esprits du mal qui vont se manifester sur le chemin du héros.

Ce roman se laisse lire, ménage ses effets, mais j’avoue que j’avais deviné une grande partie de la révéation finale, donc une petite déception sur ce point, mais toute petite… cela reste un roman très solide et différent des autres oeuvres du maitre qui ont croisés mes yeux avides ses derniers mois…

Les Rats de James Herbert

517cYmFAmBL._SY344_BO1,204,203,200_présentation éditeur : Ils avaient appris à vivre dans l’ombre, furtivement, à sortir surtout la nuit et à craindre les hommes. Et soudain ils commencèrent à réaliser leur force et à prendre goût à la chair humaine. A leurs dents tranchantes comme des rasoirs, à leur nombre venait s’ajouter une arme supplémentaire : l’horreur et le dégoût qu’inspirait leur multiple grouillante. Bientôt on découvrit les restes ensanglantés des premières victimes…

Ce roman est le premier de James Herbert, et il faut avouer que pour un coup d’essai, c’est un coup de maitre ! Plus de quarante ans après sa sortie, cette histoire d’horreur n’a pas pris une ride. Située dans les années 70, dans une Angleterre encore hantée par la Seconde Guerre mondiale (la reconstruction est loin d’être terminée), ce roman pourrait être transposé aujourd’hui dans les grandes capitales du monde… Car, on est jamais à plus de quelques mètres d’un rat… Albert Camus nous avait déjê fait très peur avec la peste, James Herbert va bien plus loin… Les rats sont plus puissants, plus gros, plus intelligents, et plus mortels…

Camus et Herbert n’ont pas le même message… Quoique… La nature semble vouloir punir l’homme dans les deux cas, et le pauvre Harris, jeune professeur idéaliste, est un héros bien impuissant face à cette menace, même s’il fait de son mieux pour sauver le maximum d’innocents.

Les Rats est un roman d’horreur atypique, dans le sens où l’ont suit une multitude de monsieur et madame Tout-le-Monde face à la menace. Certains sont des lâches, d’autres des héros, mais tout cela n’est pas le plus important… Le plus important c’est cette menace qui croit et se multiplie… Que ferions-nous si les rats de Herberts étaient ceux que l’ont peut apercevoir dans le métro de Londres ou celui de Paris aux heures calmes ?

James Herbert a su avec ce premier roman créer une montée de l’horreur – et pourtant il commence fort, car dès les premières pages, c’est un bébé qui est dévoré par les monstrueux rongeurs (et oui, âmes sensibles s’abstenir… et ce n’est certainement pas une lecture pour le métro, ou les bords d’une rivière… ou même la salle des profs…).  La montée de l’horreur est constante, jusqu’à…

Une lecture que je recommande pour ceux qui aime faire monter leur taux d’adrénaline, bien au chaud sous leur édredon…

Bonus : Pour ceux qui lisent en vo, je recommande l’édition des 40 ans, noire et or, à la couverture grignotée… par les rats !

« L’Ile aux trente cercueils » adapté par Marc Lizano

album-cover-large-14571L’Ile aux trente cercueils est un de mes « Lupin » préférés, une fleur noir d’encre qui s’est épanouie comme un roman gothique avec une fin que beaucoup n’apprécient pas, mais que je trouve brillantissime. Attention, si vous n’avez pas lu la suite, évitez le paragraphe à venir !

Sur l’Ile, Véronique est face à son destin, une dramatique prophétie qui la voit mourir crucifiée… les trois-quart du roman, la jeune femme est seule, victime de cette malédiction, comme une pauvre innocente perdue dans un labyrinthe créé par l’esprit perverse d’un Lewis ou d’une Ann Radcliff… Maurice Leblanc nous offre un roman gothique, un thriller avant l’heure sur une ile bretonne… Mais dans les dernières pages, la drame devient comédie,  Arsène ou plutôt Don Luis, débarquant comme un Deus ex-machina de son sous-marin, ou plutôt comme un diable jaillissant de sa boite pour faire de la tragédie une bouffonerie, terrassant le dragon (non sans cruauté), sauvant la Belle, mais la rendant à l’homme qu’elle aime, ressuscitant les morts, et partageant la vedette avec un chien… Oui, certains trouvent la fin de L’Ile aux Trente cercueils ridicule, moi, je la trouve grandiose ! sublime, et je garde rancune au feuilleton des années 70 (chronique ici) d’avoir sabordé mon Lupin en peau de lapin, mon druide millénaire, mon comédien de boulevard adoré qui détruit toute cette vilaine tension accumulée quant au sort de la malheureuse Véronique… Cependant, je n’en veux pas du tout à Marc Lizano qui a su créée une fin plus ressérée et mis en scène l’Ile telle que je me l’imagine… donc finis les spoiliers, passons à la chronique !

Présentation Editeur : Quatorze ans ont passé…
Véronique d Hergemont, qui avait fui loin de son ex-mari le monstrueux comte Vorski, est de retour en Bretagne sur l ile de Sarek : elle espère y retrouver son père et son fils, jadis disparus et déclarés morts…
Seulement voilà, une mystérieuse légende plane. L ile, cernée par trente écueils menaçants, serait l ile aux trente cercueils : trente victimes sont censées mourir, dont quatre femmes, en croix. Et la prophétie semble déjà enclenchée…
Mais que dissimule réellement cette prédiction sanglante ? Véronique retrouvera-t-elle la chair de sa chair ? Et à quel prix ? Une histoire haletante qui mêle habilement humanisme, policier et fantastique. Editions Soleil, Collection Noctambule

D’abord, je vous parlerai de l’objet.

Ce roman graphique est simplement magnifique, le format est idéal pour la lecture, et l’auteur a eu la brillante idée de présenter l’histoire en feuilletons, une page interrompant le récit, mais pour offrir des informations intéressantes sur le roman, sur Maurice Leblanc, sur l’adaptation… C’est joliment fait, et cela donne un petit goût d’autrefois qui va bien avec cette histoire d’un autre âge.

Du côté du dessin, j’aime beaucoup la couleur sépia qui domine, ainsi que le semi-réalisme (je pense que c’est ainsi qu’on décrit ce type de dessins) qui donne un côté onirique – ou cauchemardesque – à l’aventure. Véronique a l’air  un peu jeune, c’est mon seul reproche, Tout-Va-Bien (le chien du fils de Véronique), a une bouille impayable, même si je ne sais pas pourquoi, je me le représentais plutôt comme un ratier…

Marc Lizano choisit également, très intelligemment de changé de perspective de narration quand Veronique  est seule (ou presque) sur l’Ile… Les pages se trouvent divisées entre Bande dessinée et journal intime. Cela permet de rejoindre, et rappeler le roman de Maurice Leblanc qui pouvait au fil de sa plume nous faire part si facilement des peurs et interrogations de l’héroine.

La fin diffère du roman, mais le fait avec plus de logique qu’un certain feuilleton ; j’ai passé un très bon moment de lecture avec cet ouvrage qui rend hommage à l’oeuvre de Leblanc tout en sachant s’en detacher sans la trahir.